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Règlementation

RDUE - Règlement européen contre la déforestation et la dégradation

27/02/2024



Le règlement européen relatif à la lutte contre la déforestation et la dégradation des forêts (RDUE) entrera en vigueur le 30 décembre 2024. Les entreprises ont donc moins d'un an pour se mettre en conformité. Pour les microentreprises et les petites entreprises, la date est fixée six mois plus tard, au 25 juin 2025.

C'est en avril 2023 que les choses sérieuses ont commencé : le Parlement européen a adopté ce règlement à une large majorité (552 voix pour, 44 contre et 43 abstentions). Il a été publié au Journal Officiel de l'Union européenne (UE) en juin 2023.

 

Pour en savoir plus, regardez :

  • Le premier webinaire du Commissariat général au développement durable (CGDD) consacré à la présentation des obligation des entreprises (20 avril 2023) ;
  • Le second webinaire du CGDD consacré à la mise en oeuvre du RDUE (22 novembre 2023).

 

LES OBJECTIFS DU RDUE

 

Ce règlement a 3 objectifs fondamentaux :

  • La protection de l’environnement, dont le volet principal sur la protection et sur la préservation des forêts ;
  • La légalité et la durabilité : les commodités concernées par le règlement doivent être produites conformément au droit international applicable en droit national du pays de production, et à la législation du pays de production, dans différents domaines ;
  • Le respect des règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

 

Le RDUE a aussi 3 objectifs spécifiques :

  • Minimiser le risque que des produits associés à la déforestation et à la dégradation des forêts n’entrent ou ne sortent du marché européen ;
  • Augmenter la demande et le commerce de produits et de matières premières n’ayant généré aucune activité de déforestation ou de dégradation des forêts ;
  • Transformer les chaînes d’approvisionnement : avoir plus de transparence, faire évoluer les chaînes de valeur pour qu’elles ne soient  liées à aucune source de déforestation.

 

LES 7 MATIÈRES PREMIÈRES CONCERNÉES PAR LE RDUE, ET LEURS PRODUITS DÉRIVÉS

 

  • Le café : torréfié, décaféiné, coques et pellicules de café, succédanés contenant du café ;
  • Le cacao : fèves et brisures de fèves torréfiées ou non, coques, pellicules, autres déchets, beurre, graisse et huile de cacao, poudre et pâte de cacao même dégraissées, chocolat, etc. ;
  • Le caoutchouc : naturel, gommes naturelles analogues sous diverses formes, caoutchouc mélangé, fils et cordes, courroies, pneumatiques, etc. ;
  • Les produits issus du palmier à huile : dont ses noix et amandes, huile de palme et de palmiste, tourteaux, différents acides, glycérol, etc. ;
  • Le soja : fèves, farine de fèves, huile et fraction raffinée ou non, tourteaux, etc. ;
  • Le bœuf : viandes fraîches, congelées ou réfrigérées, abats comestibles, cuir et peaux, etc. ;
  • Le bois : brut, de chauffage, sous diverses formes, et tous ses dérivés, comme le papier imprimé, la laine de bois, les panneaux de particules, le charbon de bois, les meubles, les outils, etc.

 

Pour une liste plus détaillée de tous ces produits dérivés, vous pouvez consulter la page 38 du règlement (texte téléchargeable dans toutes les langues de l'Union européenne).

 

Les entreprises devront prouver que la production de ces produits respecte la loi du pays où elle a eu lieu. Elles devront aussi prouver que cette production n’a pas causé de déforestation ou de dégradation des forêts depuis le 31 décembre 2020, date de référence, dite date de « cut off ». Elle correspond aux engagements internationaux existants :

 

  • aux objectifs de développement durable de l'Organisation des Nations unies, Déclaration de New-York sur les Forêts ;
  • aux actions de la Commission européenne : communication intitulée Intensifier l'action de l'UE pour protéger et reconstituer les forêts du monde, le Green Deal européen, la stratégie de l'UE en faveur de la biodiversité à l'horizon 2030, et la stratégie De la ferme à la table.

 

Le RDUE étant un règlement, il devra être adopté de manière uniforme par tous les États membres de l’UE, contrairement à une directive qui nécessite une transposition dans le droit national.

 

Des examens périodiques du texte auront lieu, a priori au bout d’1 an, 2 ans, puis 5 ans, pour inclure dans le périmètre d’autres terres boisées et systèmes riches en biodiversité telles que les tourbières, éventuellement intégrer le secteur financier, le maïs et les biocarburants d’huile de palme dans son champ d'application.

 

L'ÉVALUATION DES RISQUES DANS LE CONTEXTE DU RDUE

 

Après l'entrée en vigueur du RDUE, seuls les produits qui respectent les conditions suivantes pourront être importés dans l’Union européenne ou exportés depuis l’Union européenne :

 

  • Les produits exempts de déforestation, définie par le règlement comme « conversion, anthropique ou non, de la forêt pour un usage agricole ». En d'autres termes, les produits ne doivent pas contenir, être nourris avec, ou être fabriqués/produits (1) à partir de matières issues de terres déforestées après le 31 décembre 2021 (2). Pour les produits du bois, ils doivent provenir de forêts exploitées sans dégradation après cette même date.

 

  • Les produits fabriqués/produits en conformité avec la législation du pays de production, respectectant les droits d’utilisation des terres, la protection de l’environnement, la règlementation forestière, le droit du travail, les droits de l’homme, le droit des tiers, le principe du consentement préalable libre et éclairé (CPLE) y compris conformément à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, et la fiscalité, le commerce, la réglementation douanière et la lutte contre la corruption. Le cadre d’application du RDUE va donc au-delà de la seule réglementation forestière.

 

  • Les produits ayant été soumis à une déclaration de diligence raisonnée. Les distributeurs et les commerçants des produits concernés seront tenus, en examinant leur chaîne d'approvisionnement, de prouver l'absence de risque de déforestation ou de démontrer la maîtrise de ce risque. Trois principales étapes sont nécessaires : la collecte d'informations, l'évaluation des risques basée sur ces informations, et la démonstration de la maîtrise du risque, le cas échéant, par la mise en place de mesures et d'actions. Les déclarations de diligence raisonnée seront enregistrées sur une plateforme numérique officielle.

 

LES PRÉPARATIFS POUR L'APPLICATION DU RDUE

 

Tous les deux mois d'ici au 30 décembre 2024, une soixantaine de parties prenantes, notamment des États membres de l'UE, se réunissent au sein d'une plateforme dédiée à la déforestation, où toutes les filières sont représentées.

 

Sous la présidence de la Commission européenne, ils évaluent les progrès dans la mise en œuvre du texte et répondent aux questions. Les candidatures pour toutes les filières pouvaient être déposées avant septembre 2023.

 

Voir la liste de toutes les filières

 

Si votre organisation est concernée par l'application du RDUE, vous pouvez contacter le représentant de votre filière qui transmettra vos questions et suggestions à la Commission. À noter aussi que la Commission européenne a publié une FAQ détaillée en anglais, mise à jour pour la dernière fois en décembre 2023.

 

En complément de cette plateforme, un groupe de travail informel rassemble des représentants des États membres de l'Union européenne. Leurs travaux contribuent à la FAQ mentionnée précédemment et aux futurs documents de cadrage.

 

Deux groupes de travail ont également été formés, regroupant des expert·es sélectionné·es par la Commission parmi les membres de la plateforme :

  • Un groupe "Petits producteurs" visant à faciliter leur préparation et leur intégration dès la mise en application du texte (leur première réunion a eu lieu en décembre 2023) ;
  • Un groupe "Traçabilité" devant se réunir pour la première fois début 2024.

 

Les résultats de leurs travaux seront partagés sur la plateforme.

 

 

Divers outils sont prévus :

  • Un document de cadrage (Guidance document) en cours de préparation, prévu pour une publication courant 2024. Il fournira des explications détaillées pour faciliter la mise en œuvre du texte (y compris peut-être des éléments de cadrage par filière, comme évoqué par la Commission) ;
  • Des lignes directrices spécifiques sur l'usage agricole, à paraître fin 2024 ou début 2025 ;
  • Un système d'information, une interface où seront enregistrées les déclarations de diligence raisonnée. Un test pilote a eu lieu en décembre 2023 avec une centaine d'entreprises, d'autres sont prévus (les entreprises intéressées doivent signaler leur intérêt à leur représentant de la plateforme, puis une sélection sera faite par la Commission) ;
  • Des formations sur l'utilisation de l'interface d'enregistrement des déclarations de diligence raisonnée.

 

 

UN FUTUR OBSERVATOIRE EUROPÉEN DE LA FORÊT

 

Dans le cadre des travaux préparatoires mentionnés ci-dessus, un Observatoire européen de la forêt est en cours de création en conformité avec le RDUE. Cet observatoire comprend plusieurs volets, notamment :

  • Un suivi satellitaire du couvert forestier mondial à partir de 2020, permettant l'identification des phénomènes de déforestation à court, moyen et long terme ;
  • Des informations sur les flux commerciaux, détaillant la nature, le volume et la direction des flux de produits et de sous-produits entre les pays et les régions.
  • Divers outils de surveillance des forêts, incluant l'analyse quasi en temps réel de séries temporelles de données satellitaires, l'analyse de la structure du paysage, la distribution des espèces d'arbres en Europe, etc.

 

Les premières cartes de l'Observatoire européen des forêts sont disponibles depuis décembre 2023.

 

En conclusion, notons les prochaines échéances à la fin de 2024 : la publication de l'évaluation des pays et des régions à risques. Soulignons qu'aucun pays ou zone ne figure actuellement dans cette catégorie. À l'échelle nationale française, une autorité compétente a été désignée fin 2023, et des travaux sont en cours pour aligner ses attributions sur les services de l'État concernés.

 

Les premiers contrôles débuteront en 2025, et toutes les entreprises doivent être prêtes. L'équipe Empreintes sociales d'EVEA est là pour vous informer et vous accompagner dans vos projets liés à cette réglementation. Cela inclut l'analyse de votre ou de vos chaînes d'approvisionnement, identification des risques liés à la déforestation et au non-respect de la législation nationale en matière environnementale et sociale, que ce soit via une analyse du cycle de vie sociale ou d'autres méthodes. ■

 

Pauline Roignant, responsable Veille chez EVEA

_______________________

 

(1) La date de production correspond à la date de récolte. Pour les animaux, elle correspond à la durée de vie de l'animal, abattage inclus (cette information doit être connue et transparente pour tous les lieux d'élevage)

(2) Les données doivent être conservées pendant 5 ans

 

 

 

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